1. * Christophe signifie étymologiquement : « qui porte le Christ ». 6. L’un est à l’intérieur de la maison, l’autre, le père, à l’extérieur, dans le jardin. » Aux résistances du géant, l’enfant oppose son obstination : « Mais je resterais avec toi, au bord du fleuve »; « Mais je resterais si volontiers auprès de toi, sur la rive ! C’est à un tout autre moment que celui de l’été et des vacances. De la fragilité de la voix Cendre, comme si les collines cachaient un feu Exacte symétrie du célèbre oxymore de Corneille: « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles » (Le Cid). Un récit entre mythe et merveilleux « Je comprends maintenant que ce fût Cérès qui me parut ». Débordants de choses fermées » (page 72). C’est la maison de Tours, celle qui s’oppose en tout point pour l’enfant à la maison des grands-parents maternels, la maison rêvée de Toirac. « Réelle …la voix », « Réel, seul, le frémissement de la main… », « réelles, seules, ces barrières qu’on pousse dans la pénombre… ». 3. À qui adresser ses espoirs mais aussi ses interrogations et ses doutes. Il se tient sur le « seuil » : « J’étais seul sur le seuil dans le vent froid ». Qui conduit son passager vers la sombre rive de la mort. 1. L’enfant, déçu dans son attente, « maladroit » peut-être à attirer sur lui l’attention du père, « maladroit » à lui faire don de son désir de le voir reprendre le dessus sur sa vie, brouille les cartes au profit du père, afin « que celui qui perdait gagne ». Le décor qui sert de toile de fond à cette nouvelle errance est un décor nocturne, au bord d’un fleuve masqué par des roseaux. Et si l'on s’amuse à établir un parallèle entre ces deux titres, il est possible d’imaginer que « seuils » et « mots » sont très proches, ont les mêmes pouvoirs. Le même vers développe de manière insistante et l’image du leurre et l’idée d’une progression. • « Le blé » Arbres qui s’animent et s’écartent, livrant passage au dormeur. Et sa poésie ne parvient pas à rendre au poète une enfance à jamais perdue. Salué dès sa publication en octobre 2001 comme l'un des livres majeurs d'Yves Bonnefoy, Les Planches courbes s'impose en effet au sommet d'un œuvre sans faiblesse ni reniement. Le déterminant indéfini « une » s’est substitué au défini « la ». Il en est la dynamique nécessaire. Entre les deux maisons se trouve une carte unique, la VI. 1. Le premier recueil des Planches courbes se ferme sur les deux vers qui réaffirment la confiance du poète dans la poésie : « La première parole » peut advenir, « Le premier feu » peut prendre. La « sans-visage » Bonnefoy a aussi une sœur aînée. DANS LE LEURRE DES MOTS Elle ressurgit dans le dernier poème de La Maison natale, réhabilitée par le poète. DANS LE LEURRE DES MOTS Sensible à la répétition - « de branche en branche » -, elle l’est aussi au balancement : « c’est là nouveau ciel, nouvelle terre ». Cérès, mère de la jeune fille enlevée par Hadès, est aussi la mère du « je  ». Emboîtements poétiques : De Bonnefoy à Keats et de Keats à la Bible. Les six mois de vie souterraine correspondant au dépérissement de la nature et à l’hiver, les six autres au renouveau, printemps et été. Promesse d’un espoir, à peine entrevue, aussitôt refusée. Mais il est aussi celui que le géant sauve du fleuve. Ici cette incapacité touche à ce qu’il a de plus profond en lui. C’est sans doute l’expression de ce désir étrange qui pousse l’enfant à abandonner la barque - et partant, le ventre maternel - désignée à la laisse suivante par la périphrase : « ce sol qui bouge ». PREMIER VOLET Ce sont des femmes. La pluie, cette eau du ciel qui tombe continûment, a remplacé l’écume et l’eau de la vague du premier poème. Avec le sixième poème s’amorce un changement. Les différentes problématiques développées ici par Yves Bonnefoy se rattachent à la post-modernité. Quel lien l’enfant a-t-il avec cette femme ? La longue parenthèse se clôt sur quatre vers séparés du corps du texte par un blanc. Et l’on craint pour la Belle, qui se désaltère « avidement » à la coupe qui lui a été offerte. 2. L’enfant cherche à comprendre et il n’y parvient pas. Il est probable que l’enfant ait fait sienne pour toujours, à partir de ce matin-là, la souffrance indicible du père. Celle de la montée progressive et sûre de l’eau qui « arrive », « franchit » le bord, « emplit la coque » malmenée par les « courants », « atteint le haut de ces grandes jambes ». Est-ce de l’enfant qu’il s’agit ou de la petite fille ? L’enfant évoque le souvenir de cette longue traversée qui appartient au passé de son enfance : « Je regardais », « Je dédiais ». Qui ailleurs consumait un univers. À l’inverse du « pêcher qui ne grandit pas ». L’ensemble de ces trois recueils forme un tout. Il sait aussi qu’il lui faut une pièce pour pouvoir monter dans la barque. Lecture analytique des Planches courbes d'Yves Bonnefoy. Est-ce la même, est-ce une autre ? De s’adresser à elle, comme aux temps anciens où elle était honorée de « guirlandes de feuilles et de fruits », objet de culte et de gloire. DANS LE LEURRE DES MOTS 2. Elle est … Qui est « la sans-visage » ? Si l’enfant est seul, c’est la première fois qu’il évoque sa maison, ici de manière métonymique, « notre porte », en la situant par rapport à ceux qui avec lui l’habitent. LA MAISON NATALE Le poète s’approprie ce vers de Keats, le fait aussitôt sien : « Je n’ai eu qu’à le reconnaître » c'est-à-dire, mot à mot, re-naître – avec –  « et à l’aimer ». Mais il bascule au moment où l’enfant s’interroge. 6. Appel à la compassion et à l’amour Placé en tête de vers, l’infinitif anaphorique martèle la laisse comme la rame martèle la vague de son rythme régulier. Le refus de la paternité Cours sur Les Planches Courbes 4/35 Le père d’ Yves Bonnefoy est ouvrier aux chemins de fer et il meurt en 1936. 6. Il lui faut se souvenir. • Comment passe-t-on d’un seuil à un autre ? HUITIÈME POÈME » L’enfant participe donc indirectement à cet échange, non pas tant comme acteur que comme auditeur. Décrite avec plus de précision et d’insistance - à noter au passage les allitérations en « v » et en « b », dont deux en début de vers, Belle/Buvant; et les assonances en [ã] : « lampe », « tenant », « buvant », « avidement », la Belle surprend par la comparaison qui lui est associée : « comme une lampe ». Contraint par Vénus de renouer avec son errance, il ne connaît pas de répit. Parvenu à la fin de son expérience, l’enfant accepte que le message de la déesse comporte des zones d’ombre : Soumise aux affres du doute, exposée à la déconstruction du langage et à la perte de sens, la poésie a le pouvoir de rebondir sans cesse. Une évocation dans laquelle la forme mythologique et la forme biographique s’entrelacent, intimement mêlées. Mais quelle est cette « autre rive »? « Et je touchais …dans l’image » ; « Je découvrais » ; «  j’écoutais ». Avec le glissement inattendu autour de la figure du géant qui combine en lui plusieurs visages. Actives et vigilantes, elles imprègnent de leur présence physique corps et voix, l’espace intime et chaleureux du foyer. De cette alternance naissent les saisons. Pour lui, l'enfance est synonyme de sagesse, en effet, il préfère les sensations à la parole; tel que son étymologie le montre, l'infans est celui qui ne parle pas. Ce que désire l’enfant, la « fièvre » qui le brûle, dépasse la victoire éphémère du jeu. « Partout en nous rien que l’humble mensonge Sans doute la masse de l’eau qui fait poids contre la porte. Quel sens attribuer à cette figure féminine dans le recueil de Yves Bonnefoy ? Le récit de la partie de cartes se déroule sur une longue phrase de quatorze vers très peu ponctuée. ***Assez bon état (très petite ride en biseau de quatrième de couverture, attention à la nature du brochage) Il ne laisse rien passer des secrets dont le poète a besoin. L’errance du poète est tracée par « un chemin/Qui monte et tourne ». Le « Mais » de la strophe suivante introduit une opposition. L’adjectif « courbes » qui accompagne ici le nom évoque, lui, une forme. Elles servent d’appui à l’enfant à l’intérieur d’un esquif, d’une barque. Et s’il accepte de se perdre de vue, c’est pour se mieux retrouver ensuite. Alternant vers brefs, tétrasyllabiques (4 syllabes), vers longs, endécasyllabiques (11 syllabes), ils sont un commentaire du poète sur la difficulté de rendre compte de cet épisode par l’écriture. Succession d’actions qui marquent l’engagement du géant auprès de l’enfant. Ici, la « pierre », cette image « simple », prend tout son sens. » Inconsciemment et spontanément, le lecteur, par la voix de l’enfant, associe Cérès, nommée à l’avant-dernier vers, à la « Belle ». 3. Assis à la croisée l’un en face de l’autre, les parents sont d’abord présentés de manière indéterminée : « un homme et une femme  ». Des bribes de vie s’en échappent encore, quelques résonances parfois, quelques notes plus éclatantes. « Peut-être que nos vies seront plus confiantes. Mais le contenu de la parenthèse en est totalement différent. Une rencontre qui passe par les sens, visuel, tactile et auditif. Le tracé de ses signes ne se déchiffre pas aisément. La troisième et la dernière du recueil. Mais une autre cloison s’interpose qui sépare la « sans-visage » de l’enfant, empêche toute communication entre eux et interdit le passage de part et d’autre de la porte. Il est considéré comme un poète majeur de la seconde moitié du XXe et du début du XXIe siècle. Pour aborder cette question importante, le géant, sorti de son repaire de roseaux, s’installe « sur une pierre, près de sa barque ». Elle est illusion du réel. Parole même obscure… » Le « chemin » au « chardon bleu » Mais ce n’est pas la maison de Tours. La scène décrite ici est inversée par rapport à la scène du début du poème VII. Puisqu’elle s’évanouit, emportant avec elle son rire « dans les couloirs de la maison déserte ». La troisième offrande » Trop nombreuses aussi. Celui-ci est accueilli « dans ses vastes mains » et placé « sur ses épaules ». LES PLANCHES COURBES Au mystère de la figure paternelle viennent se superposer d’autres mystères fortement liés à l’enfance. De rage, elle métamorphose l’enfant en stellion (en grec, ascalabos veut dire "lézard moucheté", "gecko" ou "stellion"). « La maison qui fut et rien de plus » La proximité avec l’autre, l’échange, passent aussi par la proximité charnelle d’une voix. Or le « simple » appartient au monde de l’enfance et à son évocation. Cependant l’image de l’eau n’est pas figée. Le jeu des allitérations en « S » S’engage alors une discussion autour du père, dans laquelle le « géant » tente de proposer une approche de cet être à part. Ce tout permet d’aborder l’œuvre poétique d’Yves Bonnefoy et d’en appréhender composantes et lignes de force. 3. Ancrages Dépossédé de tout, jusqu’à la notion même de père lui est inconnue : « Un père, dit-il, qu’est-ce que c’est ? 6. Tout aussi « impénétrable… que la fraîcheur de ce matin-là du monde ». La phrase nominale est complétée par une forme présentative au passé, « ce fut », qui introduit « à nouveau » la « maison natale ». Ces jeux des autres, à jamais les autres, dans leur joie. Il joue à la fois sur le registre du réel - le vêtement - et sur celui de l’écran - la métaphore du « voile de l’eau ». Cette cloison laisse passer l’extérieur vers l’intérieur (l’eau du dehors/l’eau du dedans). Le lieu clos qui traverse cet espace est le train. Une élucidation de l’énigme du tableau d’Adam Elsheimer dans « l’arrière-pays » affectif et pictural qui est le sien. » L’exil Le poète se retourne vers le passé et l'enfance. Yves Bonnefoy – « Dans le leurre des mots » I Incipit et vers remarquables : Contenu 1 « C’est le sommeil d’été cette année encore, Désir d’accéder à la conscience exprimé dans L’or que nous demandons, du fond de nos voix l’opposition entre sommeil et voix. Le dialogue reprend, ponctué par les résistances du géant, par l’insistance de l’enfant dans sa dernière supplication : « Oh, s’il te plaît, sois mon père ! La troisième visite à la maison natale semble se solder, elle aussi, par un cruel échec. L’énigme Une errance complexe, à visage de Janus bifrons*, qui combine à la fois le retour sur le passé et la marche vers la mort. « Désirs d’autres feux que ceux qui brûlent dans les brumes de nos demandes. « Les Planches courbes » d’Yves Bonnefoy [extrait] Le Posted on 2 août 2014 6 avril 2017 - Citations et extraits, Lectures. 3. La reformulation de cette interrogation place à nouveau le géant devant l’épreuve de son engagement auprès de l’enfant. Il n’écrira pas une poésie de la violence, du « tumulte des griffes et des rires qui se heurtent », de la dislocation du langage, une poésie de la dénonciation de la barbarie du monde, de ses injustices. Être père implique aussi une stabilité, un ancrage : « Pour être père, il faut avoir une maison ». La première représentation qui nous est donnée de la maison natale est donc une image de l’exil, occupée par la figure centrale de la « sans-visage ». Ainsi du mot « leurre », mot qui est récurrent chez le poète. À plusieurs reprises, cependant, le poète transforme le récit en le soumettant à des bifurcations imprévues. Cherchez Les Planches courbes sur Amazon et Wikipédia. La traversée du fleuve à la nage. L’exaltation de l’enfant explose dans la seconde strophe en même temps que le jour. Et si le poète s’était ingénié à glisser dans son poème, les sinuosités du serpent pour suggérer, sans le nommer, le nom d’Eurydice, derrière celui, absent, de la « sans visage »? selon les recommandations des projets correspondants. Mais ce serait un contresens grave puisque Yves Bonnefoy se déclare athée. Être père implique davantage que de ne s’éloigner « jamais d’un bord de la rive à l’autre  ». La répétition de l’adverbe interrogatif « Comment » à trois vers d’intervalle montre l’insistance et l’urgence des questions posées. « Avec le même orient ». Une errance qui prend corps dans l’écriture et se nourrit de l’« humble mensonge des mots ». Le dialogue sur la question du père est momentanément interrompu pour laisser la place à nouveau au rite du passage. Comme si tout ce qui était en train de se dire ou de se jouer devait l’être d’une seule traite. Nombre de ses textes sont à l’imparfait. Du décor initial de la maison natale, il reste « le sol noir » et l’allusion au déluge antérieur: « de l’eau glissait ». La disparition de la barque vient interrompre puis engloutir la question première et primordiale de la filiation. Le père apparaît en VII, les parents en VIII, la mère en IX. Il en sort une vieille femme ; elle voit la déesse et, comme celle-ci lui demandait de l’eau, elle lui donna une boisson douce préalablement recouverte d’une couche de farine d’orge grillée **. Qu’il le veuille ou non, le passeur est devenu le père désiré de l’enfant, même s’il s’obstine à ne pas reconnaître cette relation et à refuser de la nommer. Ulysse entre en scène dans la seconde laisse du poème. L’enfant tente d’y mettre de l’ordre, de lui trouver une logique : « Or, dans le même rêve » D’organiser les « images qui se sont accumulées » pendant son sommeil. L’irruption brutale, à la fin du septième vers de l’expression « et soudain » indique un basculement. Le poète, qui a bu « avidement » à la coupe de la poésie, n’aurait-il pas lui aussi été dans l’excès ? » Pourtant, ce butin constitue une « charge » encombrante : « que faire de ce bois ». Le son [u], déjà disséminé dans le poème précédent, est répété à un rythme régulier 2/2/3/2, quatre fois sur le vers 5 : « Et tout d’un coup cette proue se soulève ». Mais s’il est conscient des tragédies qui déchirent le monde, le poète est aussi conscient des limites du langage, des impasses et des leurres dans lesquels celui-ci entraîne. Le langage de l’image et le souvenir La conception de la parole chez Bonnefoy est originale : il s’agit d’une parole ouverte, lieu de célébration et … Le passage des seuils La réponse pourtant passe par lui, par l’analyse progressive et raisonnée qu’il se fait à lui-même. On trouve la même ambivalence dans le verbe découvrir : « Je découvrais  ». Se pose alors la question de l’issue. 1. Le poème IX marque l’irruption dans le récit d’un élément nouveau : « Et alors un jour vint ». Pour visualiser le plan détaillé de la lecture, CLIQUER ICI.. Ph, G.AdC YVES BONNEFOY, LES PLANCHES COURBES Divagations autour du titre du recueil Le titre éponyme du recueil (Les Planches courbes, Mercure de France, 2001 ; Gallimard, Collection Poésie, premier dépôt légal en 2003) est un titre … Et à l’amour: « Aimer enfin Cérès qui cherche et souffre ». L’impératif « Vois » est répété par cinq fois au cours de la laisse - dont trois anaphores. » La fonction de père ne peut s’inscrire dans la restriction - « ne… que » - ou dans la négation. Le troisième rêve surgit selon le même leitmotiv : « Je m’éveillai, c’était la maison natale ». Nantie de son vocabulaire ordinaire - pièces, portes et chambranles -, elle est un lieu lourd de menaces. « Aller au-delà », ou « par-delà », n’est-ce pas accepter de dépasser ses peurs, accepter la traversée des « souvenirs », « beauté » et « mensonge », « affres » ou « bonheur » ? Cette ellipse temporelle est suivie de la présentation de la maison natale, à la fois même (à nouveau/maison natale) et autre. * La référence aux jardins d’Armide et à la chimère qui habite les branches des arbres est empruntée au chant XVI, stances 13 et 14 de La Jérusalem délivrée de Torquato Tasso (1544-1595) (dit Le Tasse, en français). Une parole qui sait magistralement faire la place du sens et du chant s'élève, à … Peut-être la poésie a-t-elle besoin de ces phases de recul et de destruction pour, tel le Phénix, renaître de ses cendres et se faire à nouveau réconciliatrice des hommes et médiatrice entre les hommes et le monde ? ». Créé par les pouvoirs de l’imaginaire (éveil/rêve), il est séparé en deux par une cloison poreuse. Séquence Poésie / Yves Bonnefoy Ensemble des poèmes qui composent la section « La maison natale » / Recueil Les planches courbes Le soir, quand les enfants Ont pied, loin, et rient dans l’eau calme, et jouent encore.) Il sait où trouver le passeur. Ces rires des enfants dans l’herbe haute, Qui se cache derrière le voile ? Demeure la question poignante du père. Comment, dans Les Planches courbes, passe-t-on d’un recueil poétique à l’autre, d’une laisse à l’autre, d’un seuil à un autre ? Aucun détail ne lui échappe, ni « la dentelle/Des coussins de lainage bleu » du « compartiment », ni « le lacet de la foudre » qui déchire l’horizon. Lecture analytique des Planches courbes d'Yves Bonnefoy. Le poète leur rend hommage par l’exclamation lyrique : « Ô souvenir ». Image, G.AdC. Cette évocation, pourtant archétypale, n’a pas d’écho dans la mémoire de l’enfant : « Je ne me souviens pas de cela non plus ». Ce cinquième recueil occupe sans doute une place charnière dans l’œuvre, un « seuil » peut-être. Autant de surfaces tremblées, qui se jouent dans les « reflets  », « la buée », l’insaisissable et le flou. Le rôle du poète pour Yves Bonnefoy est d'être le gardien du cimetière des Idéaux, d'esquisser un mouvement de retour à la croyance, à l'enfance, sans jamais pouvoir retourner au monde préverbal.[réf. Elle s’installe dans la rondeur féminine de l’été, elle accueille « la grappe des montagnes » et « le sein » de la terre. L’anaphore « Et je vois », en début de strophe, puis à mi-strophe, introduit éléments du décor et acteurs : « un navire »/« des nageurs ». Sans doute celui, enveloppant, de la mort. » Celle de la difficulté du passeur qui « peine à la pousser en avant ». L’une et l’autre sont proches, toutes deux également inaccessibles. Le nom latin du gecko est stellio, stellion en français. Jusqu’au nombre de vers et à leur rythme : pour la vieille femme, un seul vers, très haché par des coupes abondantes; trois vers pour la Belle, avec une seule coupe interne qui met en relief le mot Belle. Image traditionnelle, colportée par les récits oraux - dit-on - des « jeunes et douces femmes », gardiennes du feu et de la civilisation (le cuit par opposition au cru), qui pourvoient à la cuisson des plats et veillent sur les marmites où mijotent les repas. Dans la seconde strophe du poème XII de La Maison natale, le poète revient sur le rêve de sa rencontre avec la déesse. Mais que s’est-il passé entre eux ? Le poète, rejetant toute idée de « moquerie » en appelle à la compassion : « Et pitié pour Cérès et non moquerie ». Yves Bonnefoy (1923/6/24-2016/7/1) was a French poet and essayist. Les trois personnages sont présents chez le poète comme chez le peintre. Que seul peut transfigurer la poésie. DEUXIÈME VOLET Seule demeure chez lui la volonté tenace, obstinée, d’accomplir son projet initial : « Je dois passer le fleuve ». Par ailleurs, le poème s’ouvre sur le couple binaire « Beauté et vérité », en totale symbiose grammaticale en ce début de poème. Le premier vers pourtant commence par le leitmotiv connu « Je m’éveillai ». La parenthèse de la partie de cartes Même dans les rêves ! Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre. Qui est-elle ? « Plus grand que le monde », à la fois noir et lumineux, le nautonier appartient au monde silencieux et immobile des morts. « De la musique avant toute chose. Il leur fait traverser l’Achéron, fleuve des Enfers, moyennant une obole, pareille à « la petite pièce de cuivre » que l’enfant tient « serrée dans sa main ». D’inégale longueur. 5. Peut-être la barque, avec ses « planches courbes », est-elle une variante des bois et branchages amassés précédemment, leur forme agencée pour former une conque ? ISBN 2-7152-2298-X 1. Le poète effectue un retour sur son passé pour retrouver en lui, sédimenté au plus profond de lui-même, le « sens » de ces mots, révélé par le vers de Keats. Ce récit se présente comme un conte à deux personnages. *** Book Is In French! Il est question de « planches courbes » page 104. Mais ils sont suffisamment éloignés l’un de l’autre pour que l’enfant éprouve le besoin de réduire la distance qui les sépare - distance réelle mais aussi symbolique -, peut-être pour surprendre une attitude inconnue de lui, un secret, un indice qui lui permette de répondre à la question : « Qui était-il, qui avait-il été dans la lumière ? 1. À la question de l’enfant : « Un père, qu’est-ce que c’est ? Le poème s’ouvre sur la formule rituelle « Je me souviens », celle-là même qui fait remonter le passé à la mémoire. Le temps a passé, exprimé par le début du premier vers : « La vie alors ». Les trois acteurs du rêve Consacrée à Cérès et à sa réhabilitation, la seconde strophe est une réponse aux questions posées dans la première strophe. Naufrage de « beauté et vérité » » 2. Ulysse disparaît, mais le poète lui continue son périple. À ce moment-là de l’épreuve qu’ils affrontent tous deux, solidement arrimés l’un à l’autre, le géant trouve les paroles réconfortantes pour minimiser l’aspect effrayant du fleuve et la longueur du trajet: «  N’aie pas peur, dit-il, le fleuve n’est pas si large, nous arriverons bientôt ». Pourtant, dans ce jeu de rencontre improbable, c’est la petite fille qui finalement l’emporte. Dans le leurre des mots Séparation qui préfigure sa disparition dans les voies de l’oubli: « et ce sera l’oubli, l’oubli avide ». Autant de présences qui signent de manière tangible la proximité imminente de Toirac. En VI, le récit commence par la même formule « Je m’éveillai », mais est proposée une variante qui marque une opposition avec les poèmes précédents et évoque un déplacement d’un lieu à un autre : « mais c’était en voyage ». Les « larmes » qu’elle verse sont celles du chagrin. Le bonheur passe par la reconnaissance sensorielle des choses simples. Puis il s’engage dans une définition incluse dans deux subordonnées relatives: « celui qui  »… « et qui ». Désirs qui sont aussi ceux du poète : « nos demandes » ; « notre avancée ». « Mensonge », « illusion » ou « leurre » pour la plupart des hommes, la poésie est, pour l’aède de ces chants, le seul mot qui résiste au temps et aux « désastres ». C’est l’enfant qui se trouve cette fois-ci au « fond du jardin », isolé, exclu peut-être, tandis que ses parents « se sont assis » à l’intérieur de la maison. Le face-à-face des parents Pour prononcer cette phrase clé, « Je dois passer le fleuve », suivie de l’affirmation « j’ai de quoi payer », l’enfant s’est rapproché du passeur. Il parle de lui à la troisième personne: « l’enfant », « son fils ». De l’autre côté du « voile d’eau » «  Sur la route vide » Elles « chantent des chansons ». Pourtant, une fois de plus, le poète se reprend à espérer dans la poésie qui puise « sa beauté dans la vérité ». Ces vers conclusifs n’appartiennent plus au récit. Quel sens donner à ce titre ? Le spectacle auquel il assiste se déroule sur deux registres, visuel et sonore. La même silhouette que dans l’épisode VII se dessine. Dans le Leurre des mots, La Maison natale, Les Planches courbes. Le poème est centré autour de la mère, rattachée à la figure biblique de Ruth. Le passage du monde des morts à celui des vivants est un rêve irréalisable. Peut-être aussi faut-il voir dans cette réflexion une similitude relationnelle. La barque peut alors s’ébranler et glisser vers le large. Mais elles sont confuses, enchevêtrées, insaisissables. Un monde incertain et flou, comme celui du rêve, qui échappe aux définitions claires : trois fois l’expression « on ne sait si » est répétée au cours de cette strophe. « Je regardais ». Incapable de lui dire la force de ses sentiments, il lui fait don de son désespoir. Profil d'une oeuvre: Les planches courbes [Yves BONNEFOY] on Amazon.com. C’est le temps immobile de l’été ajouté à celui des dimanches. Il découvre un espace envahi dans sa totalité : « toutes les salles/partout ». Il est présent dans l’étymologie du nom du mois de janvier. Yves Bonnefoy se réclame d'ailleurs de l'héritage de Baudelaire, et de toute la tradition romantique. » Le mot « voile » est ici ambivalent. Identité ou nouveauté : « rive nouvelle », « autre terre » ou au contraire « même monde » ? À l’adverbe « doucement » (II) répond l’adverbe « Silencieusement ». L’enfant et lui ne font plus qu’un. Je m’éveillai, Le poète tente une ébauche positive de la poésie, une réhabilitation des mots qui passe par le corps - de « la voix qui espère » à « la main qui touche la promesse d’une autre ». Dans la confrontation avec la mort qui se rapproche, « masse d’eau qui de nuit en nuit dévale avec grand bruit dans notre avenir. Intitulée La Dérision de Cérès (ou Cérès et Stellio), cette huile sur cuivre est l’œuvre du peintre allemand Adam Elsheimer (1578-1610), contemporain de Caravage. Le « simple » est là, présent dans « l’odeur » artisanale de « goudron et de colle ». 4. Un appel « simple » aux « choses proches ». • « La déesse  » (II) ** Le breuvage à base de farine d'orge grillé, de fromage rapé et de vin de Pramnos qu'offre la vieille femme à Cérès est le kykéôn, la boisson rituelle que buvaient les initiés aux mystères d'Eleusis. Une fois de plus, le corps de l’autre se dissout. Peut-être pour ne pas être entendu par d’autres ombres, peut-être pour resserrer encore l’intimité avec le géant dont l’enfant perçoit la « respiration égale, lente ». Cette passeuse de rêves et de souvenirs. La poésie passe par le retour aux choses simples, pourvoyeuses de sens. Un voyage en deux temps, qui s’articule autour du sommeil, vecteur du rêve et des images. « Comment garder/Audible l’espérance dans le tumulte », « Comment faire pour que vieillir, ce soit renaître ». 1. 4 Hélène Maury, née en 1889 à Ambeyrac dans l’Aveyron, fut infirmière, puis institutrice comme son père. 9. Le langage du dedans, le langage du rêve, est plus dense, plus percutant que celui qui recouvre les « mots » du dehors. Quelques éléments récurrents, disséminés d’un poème à l’autre, suffisent pour donner du père l’image d’un homme fatigué, tôt vieilli, usé par le travail et par les déceptions. Dès lors, l’enfant se met en quête d’un lieu propice où entreposer ses trésors. Non pas sur la figure, unique, de la mère, mais celle plurielle des femmes au foyer. L’eau frappait les pieds de la table, le buffet. Par comparaison avec les poèmes VIII et IX, le poème VII surprend d’abord par sa longueur : quarante-deux vers, répartis en trois épisodes dont une parenthèse de vingt-et-un vers. Recueil d’ouverture des Planches Courbes, Dans le leurre des mots est composé de deux volets. L’enfant est seul, à nouveau : « J’étais seul », mais le décor de la maison a changé. C’est l’enfant, qui s’est encore rapproché du géant et se relie à lui par un geste intime - « un doigt toucha son oreille » -, qui revient sur la question précédente tout en la précisant : « veux-tu être mon père ? Le langage s’est figé, en proie à « la blancheur qui transit ». Il semble qu’il en connaisse déjà les rives. Il se produit alors une scène étrange.